Qui suis-je pour te le dire ce que je te dis à la porte de l’église et je ne suis qu’un lancer de dés entre un prédateur et une proie J’ai gagné en vigilance je ne suis pas satisfait de ma nuit au clair de lune mais pour assister au massacre. J’ai survécu par accident : j’étais plus petit qu’une cible militaire et plus gros qu’une abeille volant entre les fleurs de la clôture J’avais peur pour mes frères et sœurs et mon père J’ai eu peur du verre pendant un moment J’avais peur pour mon chat et mon lapin et une lune magique, au-dessus du haut minaret de la mosquée J’avais peur pour les raisins de nos vignes ils flottent comme les seins de notre chien… La peur m’a suivi et j’ai continué pieds nus et oubliant mes petits souvenirs de ce que je voulais de demain – il n’y a pas de temps pour demain – Je vais / me dépêche / cours / monte / descend / Je crie / aboie / hurle / crie / hurle / Je vais plus vite / plus lentement / je tombe / je deviens plus lent / je sèche / Je marche / vole / vois / ne vois pas / trébuche / Je deviens jaune / vert / bleu / j’éclate / fond en larmes / J’ai soif / je suis fatigué / j’ai faim / je tombe / je me lève / je cours / j’oublie / Je vois / je ne vois pas / je me souviens / j’entends / je comprends / Je délire/hallucine/marmonne/hurle/je ne peux pas/ Je gémis / je deviens fou / je me perds / Je deviens moins / plus / tombe / monte / et tombe / Je saigne / et je perds connaissance
Par Mahmoud Darwich
et il restait encore assez de temps pour l’amour et son chagrin. Je ne sais pas si je dois parler d’amour ou d’abus, si je peux encore les distinguer. J’avais l’impression d’avoir tout vécu, même une pandémie, j’avais l’impression de n’avoir aucun contrôle sur le déroulement de ma vie. J’ai peint ce portrait comme la fin de tout ça, la fin. J’ai déclaré ma victoire après plus d’un an de dépression et des décennies de sentiment de perte de contrôle sur ce qui m’arrivait grâce à l’acceptation…